L'élixir d'amour d'Eric-Emmanuel Schmitt fait de nous les lecteurs indiscrets de l'échange par mail qu'entretiennent Louise et Adam. Les deux personnages ont été amants par le passé et ils vivent maintenant à des milliers de kilomètres l'un de l'autre : Louise vit à Montréal et Adam à Paris. Quand Adam contacte Louise, il lui propose une relation amicale que la jeune femme refuse. Les deux personnages correspondent malgré tout et Louise se demande s'il existe, comme dans Tristan et Iseult, un philtre d'amour, autrement dit, s'il existe un moyen de créer l'amour...
Ce bref roman est très prenant. Comme toujours, l'écriture d'Eric-Emmanuel Schmitt m'a emportée dans son univers. Le débat, parfois vif, parfois cynique, parfois d'un pessimisme redoutable, nous amène à réfléchir sur l'amour et plus précisément sur cette chose inexplicable qui fait que deux êtres humains vont tomber amoureux. Certaines phrases m'ont laissée songeuse : "Le dégoût est l'une des formes de l'obsession : on préfère y penser avec malaise que ne pas y penser", "Quand vous ne chercherez plus le bonheur, vous serez exaucée" ou encore "La beauté du premier amour vient de ce qu'il n'est pas encore hanté par sa fin, on y croit le présent éternel, on ignore l'épuisement" ...
Les personnages sont attachants, même si Adam m'a agacée plus d'une fois, la proximité créée par la lecture de ses mails a fait que j'avais l'impression de le connaître. J'ai adoré la position dans laquelle E.E. Schmitt nous place : nous sommes des "voyeurs", lecteurs d'un courrier qui ne nous est pas destiné et j'avais envie de me joindre à la conversation des deux anciens amants.
L'auteur a su jouer brillamment avec le rythme : certains mails sont très courts, voire laconiques alors que d'autres sont bien plus longs. De plus, l'action alterne avec la réflexion sur un rythme qui ne laisse pas le temps au lecteur de s'ennuyer.
Quant à la fin de ce roman ... je n'en parlerai pas, je préfère que vous le lisiez !
Encore une fois, E.-E. Schmitt montre qu'il est un grand, un très grand écrivain.
Voici un extrait de ce roman, il s'agit du début de la première lettre, écrite par Adam :
"Louise,
Si tu m'écoutes, bonjour.
Si tu ne m'entends pas, adieu.
Selon ta réaction, cette lettre constituera le début ou la fin de notre correspondance.
Devant moi, un soleil flétri se lève et je contemple Paris auquel octobre donne la pâleur d'une bête indisposée, tourmentée par les feuilles mortes, incommodée par les circulations tapageuses, avide d'une paix qui tarde. Vivement l'hiver. La langueur de l'été s'efface et la capitale s'impatiente d'obtenir le froid, le sec, le clair. Deux saisons suffisent à une ville, la suffocante et la glaciale.
Louise, transformons notre passion blessée en affection sereine. Crois-moi, durant ces dernières années j'ai apprécié davantage en toi que ta peau, tes cuisses ou nos étreintes, j'ai aussi adoré la femme que tu es, ton intelligence piquante, ta répartie, tes moqueries, tes enthousiasmes. Pourquoi l'éloignement me priverait-il de cette merveille ? Suis-je condamné à te perdre ? Le sexe demeurerait-il l'unique ticket d'accès ? [...]"
Pour notre plus grand plaisir, l'auteur a publié un second livre dans lequel il poursuit son analyse du sentiment amoureux, nous en parlerons la prochaine fois...
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