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lundi 16 mars 2015

L'insurrection poétique, Manifeste pour vivre ici

A l'occasion du 17e Printemps des poètes, le recueil de poésie intitulé L'insurrection poétique, Manifeste pour vivre ici a été publié par les éditions Bruno Doucey.
Des poèmes de l'Antiquité à nos jours sont classés par thème, tous en rapport avec le regard que l'on peut porter sur le monde, tous manifestent pour ou contre quelque chose, que ce soit contre la Shoah, contre l'homophobie, pour la liberté...

Ce recueil est très bien fait car les thèmes choisis sont très variés et il rassemble des auteurs classiques et des auteurs très contemporains, 110 poètes en tout. J'ai découvert avec beaucoup d'intérêt par exemple les poèmes portant sur la crise économique dans la partie intitulée "Au croc de la phynance" en référence à Ubu roi d'Alfred Jarry.





En voici un exemple avec le début du poème de Jack Küpfer, Trader, publié en 2011 :

"Ailleurs
Dans les palpitations de la nuit

D'autres vomissent dans le grand huit de l'argent facile
Planent sur les rails du pillage

Entre lancer de nain et cocktail de drogues
Chirurgie esthétique et orgie de golden boys
Monstres civilisés au solstice des affaires
Les sanctifiés du capital ruinent à pleines mains
Achètent
Vendent le monde
[...]"




lundi 9 mars 2015

"Roman" - Arthur Rimbaud - 17e Printemps des Poètes

 
 
ROMAN
 
I
On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans.
- Un beau soir, foin des bocks et de la limonade,
Des cafés tapageurs aux lustres éclatants !
- On va sous les tilleuls verts de la promenade.
Les tilleuls sentent bon dans les bons soirs de juin !
L'air est parfois si doux, qu'on ferme la paupière ;
Le vent chargé de bruits - la ville n'est pas loin -
A des parfums de vigne et des parfums de bière....
II
- Voilà qu'on aperçoit un tout petit chiffon
D'azur sombre, encadré d'une petite branche,
Piqué d'une mauvaise étoile, qui se fond
Avec de doux frissons, petite et toute blanche...
Nuit de juin ! Dix-sept ans ! - On se laisse griser.
La sève est du champagne et vous monte à la tête...
On divague ; on se sent aux lèvres un baiser
Qui palpite là, comme une petite bête....
III
Le coeur fou Robinsonne à travers les romans,
Lorsque, dans la clarté d'un pâle réverbère,
Passe une demoiselle aux petits airs charmants,
Sous l'ombre du faux col effrayant de son père...
Et, comme elle vous trouve immensément naïf,
Tout en faisant trotter ses petites bottines,
Elle se tourne, alerte et d'un mouvement vif....
- Sur vos lèvres alors meurent les cavatines...
IV
Vous êtes amoureux. Loué jusqu'au mois d'août.
Vous êtes amoureux. - Vos sonnets La font rire.
Tous vos amis s'en vont, vous êtes mauvais goût.
- Puis l'adorée, un soir, a daigné vous écrire...!
- Ce soir-là,... - vous rentrez aux cafés éclatants,
Vous demandez des bocks ou de la limonade..
- On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans
Et qu'on a des tilleuls verts sur la promenade.
                                                                                           29 sept. 70    Arthur Rimbaud
 
 

dimanche 8 mars 2015

"A ceux qui veulent rester esclaves" - Louise Michel - 17e Printemps des Poètes

 
 
À CEUX QUI VEULENT RESTER ESCLAVES
 
Puisque le peuple veut que l’aigle impériale
Plane sur son abjection,
Puisqu’il dort, écrasé sous la froide rafale
De l’éternelle oppression ;
Puisqu’ils veulent toujours, eux tous que l’on égorge,
Tendre la poitrine au couteau,
Forçons, ô mes amis, l’horrible coupe-gorge,
Nous délivrerons le troupeau !
Un seul est légion quand il donne sa vie,
Quand à tous il a dit adieu :
Seul à seul nous irons, l’audace terrifie,
Nous avons le fer et le feu !
Assez de lâchetés, les lâches sont des traîtres ;
Foule vile, bois, mange et dors ;
Puisque tu veux attendre, attends, léchant tes maîtres.
N’as-tu donc pas assez de morts ?
Le sang de tes enfants fait la terre vermeille,
Dors dans le charnier aux murs sourds.
Dors, voici s’amasser, abeille par abeille,
L’héroïque essaim des faubourgs !
Montmartre, Belleville, ô légions vaillantes,
Venez, c’est l’heure d’en finir.
Debout ! la honte est lourde et pesantes les chaînes,
Debout ! il est beau de mourir !
 
                                                                             Louise Michel, La Commune 1898
 
 


samedi 7 mars 2015

17e Printemps des Poètes !

Aujourd'hui et jusqu'au 22 mars a lieu la 17e édition du Printemps des Poètes.

A cette occasion Madame bouquine proposera, durant cette période, des billets en rapport avec la poésie (poèmes, présentations de recueils, vidéo...)
Le thème choisi cette année est l'insurrection poétique, magnifique programme, la poésie rebelle, la poésie qui dit non aux convention ... j'adore !

Le site est ICI.


lundi 2 mars 2015

L'ami retrouvé - Fred Uhlman

Après Charlotte et Inconnu à cette adresse, nous terminons aujourd'hui notre parcours thématique sur la Seconde Guerre mondiale avec un dernier roman : L'ami retrouvé de Fred Uhlman

Ce court roman raconte une belle histoire d'amitié entre Hans, fils d'un médecin juif, et Conrad, jeune aristocrate protestant. Tout semble les opposer, mais une amitié très forte nait entre les deux garçons. Quand Hitler arrive au pouvoir, ils sont un peu inquiets mais n'en font pas grand cas, ce sont des affaires d'adultes. Mais, petit à petit, le nazisme se répand, leur belle et grande amitié sera-t-elle atteinte ?

Il s'agit encore d'un roman bien connu des collégiens, mais d'un abord un peu plus complexe qu'Inconnu à cette adresse. Les deux romans traitent de l'amitié mais d'une manière très différente : ici, ce n'est pas un roman épistolaire mais un roman à la première personne, nous adoptons donc le point de vue de Hans et ses interrogations deviennent les nôtres. L'écriture de Fred Uhlman est très élégante et pleine de références culturelles. Il s'agit donc d'une très belle lecture, un incontournable.




Voici les premières lignes :

"Il entra dans ma vie en février 1932 pour n'en jamais sortir. Plus d'un quart de siècle a passé depuis lors, plus de neuf mille journées fastidieuses et décousues, que le sentiments de l'effort ou du travail sans espérance contribuait à rendre vides, des années et des jours, nombre d'entre eux aussi morts que les feuilles desséchées d'un arbre mort.
Je puis me rappeler le jour et l'heure où, pour la première fois, mon regard se posa sur ce garçon qui allait devenir la source de mon plus grand bonheur et de mon plus grand désespoir. C'était deux jours après mon seizième anniversaire, à trois heures de l'après-midi, par une grise et sombre journée d'hiver allemand. J'étais au Karl Alexander Gymnasium à Stuttgart, le lycée le plus renommé du Wurtemberg, fondé en 1521, l'année où Luther parut devant Charles Quint, empereur du Saint Empire et roi d'Espagne."

samedi 28 février 2015

Inconnu à cette adresse - Kressmann Taylor

Après Charlotte, restons dans le thème de la Seconde Guerre mondiale.

Inconnu à cette adresse est un roman court qui retrace l'échange épistolaire entre deux amis, Max, juif américain, et Martin, allemand, qui possédaient ensemble une galerie d'art aux Etats-Unis. Martin repart en Allemagne avec son épouse Elsa et ses enfants, nous sommes en 1932. Au départ, l'échange est cordial, mais dès 1933, Martin raconte à Max les événements qui se déroulent dans son pays et l'arrivée d'un certain Hitler au pouvoir...

Ce roman épistolaire très court est bien connu des collégiens. C'est un bijou. Il est à la fois très accessible et vivant, Kressmann Taylor a parfaitement su créer puis intensifier progressivement la tension dramatique, jusqu'à la chute, cinglante. La force de cette œuvre
réside dans la présence de deux points de vue : celui du juif qui, même s'il vit au Etats-Unis, sera touché par le nazisme, et celui de l'allemand, endoctriné et tellement centré sur lui-même qu'il finit par basculer.
Evidemment, c'est un coup de cœur !



Voici le début de la lettre écrite par Martin à Max en 1933, Hitler arrive au pouvoir. L'hésitation du personnage est palpable :

"Cher vieux Max,
Tu as certainement entendu parler de ce qui se passe ici, et je suppose que cela t'intéresse de savoir comment nous vivons les événements de l'intérieur. Franchement, Max, je crois qu'à nombre d'égards Hitler est bon pour l'Allemagne, mais je n'en suis pas sûr. Maintenant, c'est lui qui, de fait, est le chef du gouvernement. Je doute que Hindenburg lui-même puisse le déloger du fait qu'on l'a obligé à le placer au pouvoir. L'homme électrise littéralement les foules ; il possède une force que seul peut avoir un grand orateur doublé d'un fanatique. Mais je m'interroge : est-il complètement sain d'esprit ? Ses escouades en chemises brunes sont issues de la populace. Elles pillent, et elle ont commencé à persécuter les Juifs. Mais il ne s'agit peut-être là que d'incidents mineurs : la petite écume trouble qui se forme en surface quand bout le chaudron d'un grand mouvement. [...]"


 
 
Le prochain billet sera consacré à L'Ami retrouvé, autre roman de littérature jeunesse qui reprend les même thèmes : l'amitié et la Seconde Guerre mondiale.

jeudi 26 février 2015

Charlotte - David Foenkinos

Ce roman est la biographie de l'artiste peintre Charlotte Salomon, née en 1917 et morte en 1943, à l'âge de 26 ans, à Auschwitz.
L'histoire débute avant la naissance de Charlotte, à l'époque où sa tante, dont elle héritera du prénom, se suicide. Quand Franziska, la sœur de cette femme a un enfant, elle veut l'appeler Charlotte, son mari ne trouve pas l'idée bonne mais il n'insiste pas. 8 ans plus tard, Franziska se suicide à son tour, mais on ment à Charlotte : sa mère est morte d'une grippe. La petite fille grandit et devient peintre, mais, étant juive, elle est écartée par les nazis et doit s'exiler en France...


Ce livre m'a plu à plusieurs égards. Tout d'abord, je ne connaissais absolument pas cette peintre, j'ai donc lu avec beaucoup de curiosité sa biographie et j'y ai trouvé, d'un point de vue culturel, beaucoup d'intérêts. Evidemment, l'intérêt d'une telle lecture ne peut pas être que culturel, il est aussi humain : le destin de cette peintre est une double tragédie. Tragédie personnelle tout d'abord, car marquée par une épidémie de suicides mais aussi tragédie historique car Charlotte nait durant une guerre et meurt dans un camp de concentration durant la guerre suivante. De plus, l'écriture de David Foenkinos est très particulière, elle est très poétique. Ses paragraphes, très courts, souvent de la longueur d'une phrase, me rappellent la forme du verset, comme si l'auteur voulait opposer la poésie à la terrible tragédie qui est à l'œuvre dans l'histoire. Et pour finir, j'ai beaucoup apprécié le fait que D.Foenkinos nous fasse entrer dans les "coulisses" de sa création : à de nombreuses reprises, il nous fait part de ses hésitations, de ses recherches, de ses surprises. Cela nous permet de voir à quel point son travail est documenté mais surtout d'être avec lui à la recherche de Charlotte, nous nous attachons à chaque page davantage au personnage, comme si c'était nous qui nous étions rendus dans son école, dans son quartier ...

Gouache tirée de la série Leben? oder Theater? (« Est-ce la vie ou du théâtre ? »).
 
La presse n'a pas été très tendre avec David Foenkinos, son roman a été qualifié d' "inconsistant", de "superficiel". Ce n'est pas mon sentiment. Il est vrai que certaines vérités toutes faites - et avec lesquelles je ne suis pas du tout d'accord - m'ont agacée (comme "La véritable mesure de la vie est le souvenir"), mais l'intérêt de la vie de la peintre et l'écriture particulière du roman m'ont fait passer outre ces petites phrases.

Charlotte a reçu le Prix Renaudot et le Prix Goncourt des Lycéens.

 
Voici un extrait du roman, il s'agit du récit de l'enfance de Charlotte, avant le suicide de sa mère :

"Quels sont les premiers souvenirs de Charlotte ?
Des odeurs ou des couleurs ?
Plus probablement, ce sont des notes.
Les mélodies chantées par sa mère.
Franziska a une voix d'ange et s'accompagne au piano.
Dès son plus jeune âge, Charlotte en est bercée.
Plus tard, elle tournera les pages des partitions.
Ainsi défilent les premières années, en musique.
Franziska aime se promener avec sa fille.
Elle l'emmène jusqu'au cœur vert de Berlin, le Tiergarten.
C'est un îlot de paix dans une ville qui respire encore la défaite.
La petite Charlotte observe les corps abîmés et mutilés.
Elle est effrayée de toutes ces mains qui se tendent vers elle.
Une armée de mendiants.
Elle baisse les yeux pour ne pas voir les visages cassés.
Et ne relève la tête qu'une fois dans le bois.
Là elle peut courir après les écureuils.

Et puis, il faut aller au cimetière.
Pour ne jamais oublier.
Charlotte comprend tôt que les morts font partie de la vie.
Elle touche les larmes de sa mère.
Qui pleure sa sœur comme au premier jour de sa disparition.
Certaines douleurs ne passent jamais.
Sur la tombe, Charlotte lit son prénom.
Elle veut savoir ce qui s'est passé.
Ta tante s'est noyée.
Elle ne savait pas nager ?
C'est un accident.
Franziska change vite de sujet.
Tel est le premier arrangement avec la réalité.
Le début du théâtre."



Nous poursuivrons la thématique de la Seconde Guerre mondiale avec les deux prochains billets, l'un consacré à Inconnu à cette adresse et l'autre à L'Ami retrouvé, deux grands classiques de littérature jeunesse.

vendredi 20 février 2015

Si on recommençait - Eric-Emmanuel Schmitt


Si on recommençait est une pièce de théâtre écrite par Eric-Emmanuel Schmitt. Elle met en scène Alexandre, sexagénaire qui revient dans la maison de sa grand-mère où il a passé son enfance. Or, le passé va ressurgir brusquement : il se retrouve face à lui-même, face à l'homme qu'il était 40 ans auparavant, et pas n'importe quand : le jour où il a pris la décision la plus importante de sa vie. Que va-t-il décider ?

Je n'ai jamais été déçue par les texte d'Eric-Emmanuel Schmitt, et cette pièce ne fait pas exception. Je me suis laissée embarquer dans cette histoire qui se lit d'une traite. Je me suis identifiée à Alexandre et je me suis imaginée dans la même situation que lui, qu'aurais-je fait à sa place ? Et si nous avions tous l'opportunité de recommencer un moment de notre vie, ferions-nous la même chose ? Cette pièce a de grandes qualités : elle est drôle, agréable à lire et ouvre la porte de notre imaginaire pour nous projeter dans notre propre vie.

Lors de sa représentation à Paris, le rôle d'Alexandre était joué par Michel Sardou et a remporté un franc succès, voici quelques commentaires de la presse :

« Si on recommençait parvient à distiller sa petite musique drôle et mélancolique. La joie sur scène est communicative. Le temps (remonté) passe vite. Et Eric-Emmanuel Schmitt a réussi son pari : Sardou, le chanteur, est adoubé comme acteur par un public ravi. » Les Echos
« Eric-Emmanuel Schmitt signe une bien belle et délicate comédie. Michel Sardou est parfait. Steve Suissa réalise une mise en scène fringante. De quoi passer une adorable soirée. » Pariscope
« Le chanteur fait un retour réussi sur les planches... un bon moment grâce à cette pièce joliment mise en scène. » Femme Actuelle
« Michel Sardou joue les sages avec une malice assumée et une franche générosité. Une soirée délicieuse et tendre à savourer à tous les âges. » Artistikrezo
 
Voici la présentation de la pièce diffusée à l'émission "Télématin" :
 
 
Voici un extrait de la pièce :
 
"Sacha crie depuis l'office :

SACHA
Et zut ! Pas de savon !
 
Il réapparait en tenue d'Adam.
Lui et Alexandre se trouvent brusquement face à face.
 
SACHA
Ah !
 
ALEXANDRE
Nom de Dieu !
 
Les deux hommes stoppent, déconcertés.
 
SACHA
Vous ... vous désirez ?
 
ALEXANDRE
J'ai eu un accident.
 
SACHA
Où ?
 
ALEXANDRE
Sous cette horloge.
 
                                                                          SACHA
Cette horloge ?
 
ALEXANDRE
En fait, elle s'est jetée sur moi.
 
SACHA
Quand ?
 
ALEXANDRE
A l'instant.
 
Un temps.
 
ALEXANDRE
Votre visage me rappelle quelque chose.
 
SACHA
Mon ... ?
 
ALEXANDRE
Oui.
En réaction gênée, Sacha saisit un plaid et cache sa nudité.
 
SACHA
Vous aussi, vous me faites penser ... Seriez-vous apparenté aux Suchet ?
 
ALEXANDRE
On peut dire ça, oui.
 
SACHA
Moi aussi !
 
ALEXANDRE
Non ?
 
SACHA
Vous avez des traits de ressemblance avec mon grand-père ..."
 
 
 
 

mercredi 18 février 2015

"Contes de fées, de la tradition à la modernité" au Palais Lumière d'Evian


Depuis le 6 décembre et jusqu'au 6 avril 2015 se tient à Evian, au Palais Lumière, une exposition sur le thème des contes de fées.
A l'origine, les contes de fées n'étaient pas destinés aux enfants mais aux adultes auxquels il était raconté pendant les veillées. Les histoires étaient parfois effrayantes comme Le Petit Chaperon rouge : à l'origine, le Loup tue la grand-mère, met son sang dans une carafe et le fait boire au petit chaperon rouge. Au XVIIe siècle, Perrault met par écrit ces histoires mais les modifie pour les rendre plus "acceptables" pour la Cour et ajoute une morale afin de "plaire et instruire". Ce n'est qu'au XIXe siècle que les frères Grimm reprennent à leur tour ces contes et les adaptent pour les enfants. C'est à partir du moment où Perrault puis Grimm ont réécrit les contes que les éditeurs ont fait appel à des illustrateur afin de donner un visage aux héros. Gustave Doré, Arthur Rackham, Edmond Dulac ont mit leur art au service de ces histoires intemporelles.
L'exposition du Palais Lumière est très bien réalisée et nous permet de découvrir des peintures, gravures, sculptures, objets extrêmement variés. Dès l'entrée, nous trouvons une magnifique bibliothèque présentant de magnifiques albums ainsi que des sculptures sur livres extraordinaires. Puis, chaque espace est consacré à un conte. En descendant à l'étage inférieur, nous arrivons dans une forêt peuplée de loup ! Je n'en dis pas plus, c'est extrêmement bien fait et cela plait beaucoup aux enfants... Puis nous pouvons voir des pièces plus contemporaines. Si vous êtes de passage à Evian avant le 6 avril, je vous conseille vivement cette sortie.

Gustave Doré, Le Petit Chaperon Rouge.


















Antoine Doré, Les bois.












Sophie Lobot, La Pomme.













Installation de Katia Bourdarel, Le secret et ses louves qui tournent autour ...







Two Thieves, one Liar, Sculpture de Jim Dine, artiste fasciné par Pinocchio au point de lui avoir consacré son œuvre.









mardi 10 février 2015

Le rendez-vous de la petite souris - Christine Naumann Villemin et Marianne Barcilon



Grizzli est un chat de dentiste. Un jour, il perd une dent, il réalise alors que la petite souris va passer ! Miam miam ! il va pouvoir faire un bon repas ! Il décide donc de lui écrire une lettre pour lui demander de passer récupérer sa dent et lui promet être un chat gentil qui ne mange pas les souris. Cependant, la petite souris, nommée Léocadie Tagada, n'est pas sotte, elle lui envoie en réponse un courrier exprimant clairement son refus. Un échange épistolaire entre les deux personnages s'ensuit ...

Cet album est pour moi un coup de cœur ! Le texte de Christine Naumann Villemin est extrêmement drôle et les deux personnages sont bien campés. Léocadie est une souris qui exerce son métier avec beaucoup de professionnalisme et le chat Grizzli est un menteur qui fera tout pour parvenir à ses fins. En outre, les illustrations sont superbes : Léocadie vit dans un univers rose bonbon, le chat n'a pas une mine sympathique et surtout les lettres sont reproduites avec des écritures enfantines, sur du papier à carreaux pour le chat et sur du papier à lettre rose pour la souris.
Cet album plaira à coup sûr aux enfants en âge de connaître la petite souris mais aussi au parents tant le texte est agréable à lire et de qualité !

Voici deux pages de cet album :

 
 
 
 

dimanche 8 février 2015

L'amour est très surestimé - Brigitte Giraud

Il s'agit d'un recueil de nouvelles dont le thème est la fin de l'amour. Onze nouvelles, très différentes les unes des autres, nous présentent onze personnages qui perdent leurs illusions sur l'amour censé être éternel.
Je ne connaissais pas Brigitte Giraud malgré le grand nombre d'ouvrages qu'elle a écrit et les critiques élogieuses de la presse que je n'ai découvertes que récemment. Son style d'écriture est, tour à tour, en fonction des histoires, des effets voulus, élégante, vaporeuse, incisive ... Elle parvient à nous faire changer d'univers à chaque nouvelle bien que chacune traite du même thème.
J'ai particulièrement aimé deux nouvelles. Tout d'abord, "Tu me manques déjà", dans lequel la narratrice est une assistante sociale mariée à un "grantécrivain" qui est tellement adulé par ses lecteurs et la critique qu'il méprise la réalité banale qu'il retrouve chez lui quand il rentre de ses séances de dédicaces.
La seconde nouvelle que j'ai beaucoup aimé est "L'année de mes dix ans" : une famille part en vacances sur la Côte d'Azur, la narratrice est la fille aînée, elle a dix ans. Sa mère a des réactions étranges et un matin, elle prend son petit frère par la main et s'en va.
Dans les deux cas, j'ai aimé à la fois l'écriture et l'intrigue.
Il est vrai que les nouvelles sont pessimistes, et le titre l'indique parfaitement. Pourtant, bien que je sois d'une nature plutôt optimiste, j'ai beaucoup aimé cette lecture. et je poursuivrai ma découverte de cette auteure.

Voici le début de "Tu me manques déjà" :

"Tu dois partir samedi prochain pour une lecture à Marseille dont tu avais oublié de me parlé. J'avais repéré, depuis plusieurs semaines, que nous pourrions enfin passer deux jours ensemble. Se consacrer du temps l'un à l'autre. Peut-être quitter la ville. Nous extraire du quotidien qui semble te peser tant. J'étais attristé de savoir que le 26 octobre, jour de mon anniversaire, tu serais endéplacement. Je m'étais faite à l'idée de passer cette journée seule, puisque tu étais endéplacement. Je m'étais dit qu'on pourrait peut-être avoir un peu de temps le soir - si jamais tu ne rentrais pas au milieu de la nuit - pour un dîner au restaurant, question de mieux digérer mes quarante-deux ans."

Et le début de "L'année de mes dix ans" :

"Cela se passe sur la Côte d'Azur. C'est le mois de juillet. Il y a des vagues qui s'écrasent contre les rochers sous le chemin. Il y a ma mère qui crie tous les dix mètres, qui demande à mon père de faire attention à mon petit frère. Nous avançons les bras chargés, la glacière, le parasol, les matelas pneumatiques. Nous sommes une famille en file indienne, les uns derrière les autres, plus ou moins inquiets. Il y a les paroles de ma mère, son agacement, le silence de mon père et le chant des cigales, lourd et pénétrant."

lundi 2 février 2015

Le Maléfice égyptien – Lorris Murail


Charlène est une gentille jeune fille, adorable, serviable, un amour … et c’est bien là le problème ! Elle est si gentille qu’elle accepte de faire l’exposé à la place d’un garçon de sa classe. La raison de sa gentillesse ? Elle se trouve trop grosse et pense que si elle avait dix (ou plutôt quinze) kilo de moins, elle n’aurait pas besoin d’être gentille. Le problème avec ce raisonnement idiot, c’est qu’il lui attire des ennuis. En effet, pour faire l’exposé sur l’Egypte, qui, rappelons-le, était au départ destiné à  Raphaël, elle va se procurer un masque égyptien doté d’un drôle de pouvoir magique …

Ce roman de littérature jeunesse est court (moins de 100 pages), très facile à lire, riche en rebondissements et bourré d’humour. Bref, c’est un livre qui plaira sans aucun doute aux adolescentes, petites ou grandes lectrices, qui pourront s’identifier à la gentille, trop gentille héroïne.
J’ai moi-même passé un excellent moment lors de ma lecture. Le maléfice égyptien est exactement le type de roman qui change les idées et qui détend !

Voici les premières lignes :
"Gentille à ce point, c’est une vraie tare. Je ne me souviens plus qui m’a dit ça, un jour. Peu importe. Je suis gentille parce que je ne sais pas être autrement. Quand on est moche, faut être gentille. Moche ? N’exagérons pas. En ai-je entendu parler de mes grands yeux bleus, de mes épais cheveux blonds, de ma peau de pêche ! Mais y a toujours un mais. Inaudible, bien sûr. Les gens bien élevés gardent leurs réflexions pour eux. Seule une mère peut se permettre de glisser de temps en temps « Charlène, tu devrais te surveiller. » Les autres ne finissent pas leurs phrases. La fin, je l’entends quand même. Jolie, oui … avec dix kilos de moins. Ma balance, elle, n’a aucune éducation. Aux dernières nouvelles, ce qu’elle me dit, ce n’est pas dix. C’est plutôt quinze"

samedi 31 janvier 2015

Le Royaume de Kensuké - Michael Morpurgo


Michael est un jeune garçon de 12 ans. Il mène une vie ordinaire avec ses parents, passionnés de navigation et sa chienne Stella Artois. Malheureusement, un jour, ses parents sont licenciés et ne retrouvent pas de travail. Son père a alors une idée : toute la petite famille embarque sur Peggy Sue, le bateau devient leur nouvelle maison. Tout se déroule pour le mieux dans cette nouvelle aventure, les personnages font escale en Afrique du Sud, en Australie... Cependant, une nuit, Michael passe par dessus-bord par accident avec sa chienne. Ils se retrouvent tous les deux sur une île en plein milieu de l'océan Pacifique... mais cette île n'est pas inhabitée : un vieux monsieur, Kensuké y réside ...

Ce roman de littérature jeunesse, destiné aux 10-14 ans, est à la fois un roman d'aventure et un roman initiatique. On y retrouve les motifs de la robinsonnade : une île perdue, la survie, la rencontre avec l'autre ...
J'ai beaucoup aimé cette lecture car non seulement l'intrigue est intéressante, mais l'écriture de Morpurgo est à la fois très claire, accessible aux enfants et adolescents mais elle est aussi très élégante . Ce sont, je pense, les ingrédients qui font qu'un roman de littérature jeunesse est de qualité.
Kensuké, le vieux monsieur japonais, a connu la Seconde Guerre Mondiale, son récit sur cette période de sa vie est à la fois pudique et émouvant. La fin du roman est, elle aussi très belle.

L'éditeur, Gallimard, collection Folio junior, a réalisé une très belle édition de l'ouvrage : tout d'abord, le papier glacé contribue à rendre la lecture agréable, de plus, François Place a réalisé de magnifiques illustrations.


Il s'agissait pour moi du premier roman de Michael Morpurgo que je lisais, j'ai très envie maintenant de découvrir ses autres œuvres comme L'Etonnante histoire d'Adolphus Tips.

Voici un extrait du roman, Michael vient de tomber à l'eau :

"Des vagues de terreur m'envahirent les unes après les autres. Les lumières de la Peggy Sue avaient disparu dans l'obscurité de la nuit, me laissant seul dans l'océan, seul avec la certitude que mes parents étaient déjà trop loin, qu'ils ne pourraient plus entendre mes appels au secours. Puis je pensai aux requins qui fendaient l'eau noire, en dessous de moi - ils me flairaient déjà, étaient sur mes traces, se dirigeaient vers moi - et je compris qu'il ne me restait aucun espoir. Je serais mangé vivant. Ou bien je coulerais lentement. Rien ne pourrait me sauver.
Je fis du surplace dans l'eau, essayant désespérément de découvrir dans l'obscurité impénétrable une chose vers laquelle nager. Il n'y avait rien."

samedi 24 janvier 2015

Que ta volonté soit faite - Maxime Chattam


Avec son dernier roman, Maxime Chattam nous emmène aux Etats-Unis dans les années 60, plus précisément dans la petite ville de Carson Mills. Nous faisons la connaissance de Jon Petersen, sa naissance se fait dans le sang, il est accueilli dans ce monde par la mort. De petit garçon renfermé, qui aime jouer à des "jeux" sadiques avec des fourmis, il deviendra un adolescent puis un adulte abject, rongé par le mal.

Ce livre n'est pas à proprement parler un thriller. Si le début est extrêmement violent, la suite s'apparente davantage à un roman policier classique avec l'enquête du shérif de Carson Mills. L'écriture de Maxime Chattam, comme souvent, est très agréable à lire, les métaphores fleurissent et contrastent avec la violence des péripéties. Il me semble nécessaire d'insister sur la violence de l'intrigue : ce roman est destiné à un lecteur adulte car certaines descriptions sont difficiles à soutenir. Cependant, toute cette violence n'est pas gratuite : à la fin du roman, le narrateur nous invite à prendre un temps pour réfléchir et analyser nos sentiments face au Mal dans ce roman en particulier, puis dans la littérature en général, et même dans la vie...

Mes sentiments ont varié lors de ma lecture : tout d'abord, j'ai été mal à l'aise lors des descriptions d'actes d'une grande violence. Puis, dans le dernier quart du roman, l'intrigue peinait à progresser. Je n'irai pas jusqu'à dire que je me suis ennuyée mais j'attendais avec de plus en plus d'impatience un rebondissement. En revanche, j'ai pris un grand plaisir à découvrir les dernières pages qui transcendent tout le roman. j'ai même relu le dernier chapitre afin de m'en imprégner, tant il a fait écho en moi.
Voici un extrait du roman, il s'agit, non pas de l'intrigue en elle-même, mais de l'Avant Propos qui éclaire le lecteur sur la réflexion amenée par le livre :

"Dans bien des romans qui dissèquent ce que sont la violence et le mal, le lecteur est placé derrière le judas d'une porte qui le préserve au minimum, puis qu'il puisse observer, sans crainte, ce qu'il y a de pire en nous. Cette porte est la promesse tacite d'une littérature qui protège celui qui s'abandonne à elle. Dans ce livre la porte en grande ouverte. Ce roman, bien que violent, ne recherche aucune forme de surenchère, seulement à répondre à des questions. La plus terrible d'entre elles devrait éclore en vous une fois la dernière page de ce livre tournée. Mais pour cela, il va vous falloir emprunter les routes dangereuses. Soyez prévenu.
Et pour éviter tout malentendu, sachez que je ne suis pas le narrateur avec lequel vous allez faire connaissance, seulement celui qui a trouvé ce texte dans une vieille boite poussiéreuse entreposée dans le grenier familial.
                                                                                                              Edgecombe, 18 juillet 2014."

On reconnaît bien dans le dernier paragraphe le procédé qui fut cher aux auteurs du XVIIIe siècle consistant à prétendre avoir trouvé un vieux manuscrit afin de créer un effet de réel et de susciter l'intérêt du lecteur.

vendredi 2 janvier 2015

Bonne année 2015 !

Pour commencer, je vous souhaite une belle année 2015 !



2014 est terminé et voilà 2015. C'est l'heure du bilan :
Cette année a été marquée par le résultat du prix des Lectrice de Elle 2014 pour lequel j'ai été jury. Les résultats ont été les suivants :
Roman : Laura Kasischke, Esprit d'Hiver, un roman intéressant, mais ce n'est pas celui qui j'ai préféré.
Document : Emmanuelle Bernheim, Tout s'est bien passé, magnifique, ce livre m'a beaucoup émue.
Policier : Ian Manook, Yerulggelder, je n'avais pas aimé ce roman, comme la plupart des romans policiers proposés par Elle.
C'était une expérience enrichissante mais très prenante, si bien que j'ai laissé de côté ce blog la majeure partie de l'année.
Je n'ai donc quasiment aucune trace de mes lectures ici.



Je n'ai pas fait que lire, j'ai aussi écrit : j'ai participé à un concours de nouvelles intitulé "jedeviensecrivain", je n'ai pas gagné mais cela fut aussi une très belle expérience. Il fallait écrire une nouvelle à chute avec un nombre de caractères défini (entre 30 000 et 40 000). Le gagnant s'appelle Laurent Grima et sa nouvelle est Une vie pour la mienne, je suis très heureuse pour lui et j'ai beaucoup aimé son texte, j'ai hâte de voir ce qu'il va écrire maintenant qu'il a remporté un contrat d'auteur ! Si vous le souhaitez, vous pouvez aussi lire Avec préméditation, la nouvelle que j'ai proposée à ce concours, j'attends vos commentaires ! J'ai adoré écrire, et j'ai terriblement envie de tenter d'autres expériences en 2015.... à suivre ...



Pour finir, je me permets de faire un "copié-collé" des vœux que Maxime Chattam a formulés sur Facebook, c'est extrêmement bien écrit et c'est aussi comme cela que je vois chaque année qui passe :

"Une année qui s'achève c'est comme un roman qu'on repose après en avoir lu la dernière page. Ils filent sur l'étagère de la mémoire avec un peu de nostalgie, parfois de l'amertume, parfois du soulagement, mais avec un gros paquet d'émotions. Nos souvenirs sont les marques pages du temps, cette histoire humaine, 2014, un livre bien plein.
Aujourd'hui vous écrivez la toute premiere page d'une nouvelle histoire. Prenez en soin. Savourez. Les premières pages, tout est possible. Chaque idée est bonne, chaque rêve peut encore s'accomplir. Vous tenez encore fermement le stylo, et c'est a vous de jouer. Pensez a vous, vos désirs, et a ce que vous souhaiterez vous dire le 31 décembre prochain de cette histoire 2015 que vous vous serez racontée.
Belle et bonne année a vous."